LA
REALISATION DES LIAISONS
Une liaison est
jugée insupportable uniquement par rapport à la langue
courante...Or nous ne travaillons pas sur cette langue...
La question
dans le vers est : Quelle liaison est-il insupportable de faire ? et non quelle liaison peut-on
éviter de faire?
Le
souhaitable :
Consonne
stable : elle se prononce toujours : cher, fief, choc, OS, BOEUF, fils etc...
Consonne
instable : elle ne se prononce que devant une voyelle : chercher. Elle est sujette à apparaître ou à
disparaître. Les consonnes de liaison, flexionnelles : (s), (t), (r)
Os au
singulier le “s” est stable et se prononce “s”. Os au
pluriel : le même “s” devient instable et se prononce
“z”
Un os à ronger
des o(z) à ronger
DÉFINITION : La liaison consiste à
maintenir une consonne préexistante qui peut disparaître dans
certaines circonstances.
Parallélisme
entre le “e” muet” et la liaison.
DANS
LA LANGUE :
loi
générale : De même qu’un “e” muet
disparaît à la fin du mot phonologique, de même une consonne
disparaît à la fin du mot phonologique. (Les consonnes stables ne sont
pas concernées.)
Il
n’y a pas de liaison d’un mot phonologique à un autre mot
phonologique.
Il
vient : le “t” tombe.
Il
vient chez nous : le “t” tombe devant consonne.
Vient-il?
: Le “t” est maintenu devant voyelle à
l’intérieur du mot phonologique.
Il y
a liaison à l’intérieur du mot phonologique devant voyelle.
les hommes : groupe nominal
de beaux habits ( épithète et nom qui le suit
)
ATTENTION : savants || aveugles et savants aveugles.
La
peinture vit || à Paris, ce peintre vit à Paris
Ils arrivent : groupe verbal
Ils sont intelligents, ils ont une maison
La
conversation courante fait tomber beaucoup de “e” muets, de
même elle fait tomber beaucoup de consonnes. je vai à Paris, je
veu un gateau, c’es intéressant. Mais pas toutes et pas si souvent
qu’on ne croit : Ils ont,
mes amis, les idiots, ces ouvrages,
etc...
Dans le
vers :
—
en droit toutes les liaisons se font à l’intérieur du vers
—
en droit on ne fait pas de liaisons d’un vers à l’autre.
Evidemment
il y aura contradiction entre l’exigence du vers et l’exigence de
la langue. Quand il y a coïncidence, concordance entre le vers et la
langue la liaison sera directe et pleine. forte : Lè|Zhommes. Mè|Zamis... (
zieuter, entre quatre zyeux. )
1 )
contradiction langue / vers :
Il
dit. Et moi, de joie et
d’horreur pénétrée, “t” chute dans la langue, se
maintient..
Je
cours...( Racine,
Esther I, 1 )
Promettez : affranchi du péril qui vous presse, “z”
chute dans la langue ( idem )
Vous
verrez de quel poids sera votre promesse
(
Bazajet, II, 3 )
La
diction sera indirecte,
allégée faible.
2 )
contradiction vers / langue ( enjambement )
Non,
non, je ne veux rien. Je vois que vous voulez
chute dans le vers, maintenu par la langue.
Ëtre
à monsieur Tartuffe...
La
réalisation indirecte consiste à syllaber la consonne de liaison
avec la syllabe précédente. Conjointement la voyelle du temps
antérieure est allongée. de même la consonne peut être allongée mais affaiblie,
si elle n’est pas occlusive.
La
difficulté est contante à la césure, toujours en conflit
vers / langue. On aura donc toujours recours à la diction indirecte.
Voilà
tous mes forfaits. En voici le salaire ( Britannicus IV, 2 )
Le
Sénat fut séduit ||:
une loi moins sévère
Mit
Claude dans mon lit...( Britannicus IV, 2 )
Césure
régulière & irrégulière :
Qu’ils
semblent tous venger || un père comme vous. ( Cinna I, 3 )
[
Oui, mon frère ], [ je suis ] [ un méchant
], [ un coupable ].
Césure
à l’intérieur du mot phonologique de langue.
Il y a
toutefois une gradation dans l’allègement en fonction du lien de
parenté entre deux segments : Je suis un
méchant plus fort que Voilà tous les forfaits. En voici le salaire...
L’analyse :
Pour
la veuve d’Hector, ses feux ||
ont éclatés ( Andromaque, I, 1 )
On
pourrait croire à une diction directe de la liaison, mais il n’en
est rien : Ses feux est un groupe nominal sujet et donc un mot phonologique, il
y a donc opposition langue / vers, on aura recours à la diction
indirecte.
idem :
Lorsqu’il
vient || à la reine
expliquer son amour ( Bérénice I, sc 1 )
Il ne
vient pas “à la reine”, il vient expliquer à la
reine. Idem diction indirecte.
Vers
romantique : S’il n’y a plus de césure il n’y a plus
de diction indirecte :
Hugo
: On s’adorait [ d’un bout-à l’autre ] de la vie.
QUELLE
LIAISON EST-IL INSUPPORTABLE DE FAIRE?
Le
goût et la règle/ On a trois paramètres : La langue, le
vers et la langue courante. Une liaison possible dans la langue ( donc dans le
vers ) peut apparaître insupportable dans la langue courante.
Les
consonnes flexionnelles ( grammaticales ) sont là pour être
liées. Elles sont là pour ça, y compris par dessus le mot
phonologique de langue. La seule limite infranchissable et l’interruption
( point de suspension ) un tiret, un changement d’interlocuteur. ( pas un
simple point ) Interjection, vocatif )
Les
déterminants inaccentués sont toujours à
l’intérieur du mot phonologique donc toujours liés. [ très ] le “s” final
n’est un pluriel mais une partie intégrante du mot, et pourtant on
liera très+adjectif : très encombrant. Idem trop, idem en préposition ( en
arrière ) en
pronom. Elles se lieront de manière directe. ( idem : plus )
Les
consonnes homophones de consonnes flexionnelles sans fonction grammaticale sur
un mot lexical désaccentué à l’intérieur
d’un mot phonologique.
Homophone
: de même nature phonétique qu’une consonne flexionnelle.
Cela concerne les adjectif devant les noms. doux, petit, premier...Long est
plus difficile parce se lie en [K] qui n’apparait pas dans les marques
flexionnelles du nom ou du verbe. Elles se lieront d’une manière
directe ou indirecte selon la règle.
Dans le
vers et seulement dans le vers , le cas du nom en fin de mot phonologique de
langue maintiendra une liaison indirecte allégée : succès, goelier,
jugement, etc, les consonnes sont homophones de consonnes flexionnelles. Elles
peuvent être entendues.
Le sang, le rang, le coup sont plus difficiles voire
impossibles.parce que les consonnes ne sont pas homophones de consonnes
flexionnelles.
Les
consonnes non homophones de consonnes flexionnelles sur un mot lexical
sésaccentué : Elles seront abaissées d’un cran : Si
elles sont directes elles seront réalisées indirectes.
Si elles
sont indirectes, elles ne seront pas réalisées. C’est le
seul cas où l’on puisse ne pas faire de liaison.
exemple: le sang
à ces objets facile à s’ébranler ( Iphigénie IV, 1 )
Il
doit avant ce coup affermir son empire ( Britannicus ( I, 2 )
Le sang
facile à s’ébranler à ces objets ( fin de mot )
Il doit
affermir son empire avant ce coup ( fin de mot )
[k] et
[p] ne sont ni flexionnelles ni homophones. En fin de mot phonologique, elles
doivent être indirectes : le cran au dessus les fait disparaître. Coup est, qui plus est, à la
césure.
Les
nasales :
Les
nasales ne sont ni des consonnes flexionnelles ni homophones. On ne les lie pas
sauf determinant non accentué à l’intérieur du mot
phonologique:
C’est
bien utile
C’est
un bien||utile
son ami
un son || agréable
Une
nation || impie
adjectif
devant le nom ( non maintenu par la langue mais maintenu par le vers : diction
indirecte allégée :
vain
effort
importun
ami
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On peut
alléger la liaison pour des raisons euphoniques : Et fait couler des pleurs
qu’aussitôt il arrête ( bien que dans le même
mot phonologique.) idem : Lever les yeux au ciel
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On
ne fait pas de liaison sur les coupes très fortes, interruption,
changement de locuteur, mais aussi interjection : Hélas! Ha! ( Le h
n’est pas aspiré et pourtant on ne fait pas la liaison. )
Pour
jamais! Ah ! seigneur... ( On ne lie pas jamais.)
Ne
pas confondre vocatif ( on s’adresse à ) et dans ce cas liaison
indirecte et interjection ( On n’invoque mais on ne s’adresse pas
à dieu ) dans ce cas pas de liaison
Mais
grands dieux, une telle victime...On s’adresse aux dieux liaison possible
Ah! Le
voici. Grands Dieux, à ce noble maintien
Quel
oeil ne serait pas trompé comme le mien ( On invoque les dieux sorte de vocatif ) pas
de liaison
(
Phèdre IV, sc 2 )
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Dans
un mot phonologique en puissance la liaison sera directe parce que toujours
à l’intérieur du mot phonologique en acte :
J’irai
n’en doutez point, le montrer
à l’armée ( Britannicus ) directe